Page:Féval - Rollan Pied-de-Fer (1842).pdf/1

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



ROLLAN PIED-DE-FER.

I.



E

ntre Hédé et Bécherel, deux gros bourgs de la haute Bretagne, s’élève, au sommet d’une colline bizarrement accidentée, le château de Goëllo. Ce fut autrefois une fière et forte citadelle. Au temps des luttes féodales, Goëllo soutint nombre de luttes contre les seigneurs de Combourg et de Tinténiac, ses voisins ; il repoussa souvent aussi les assauts de l’étranger. Aujourd’hui, le château s’est fait vieux depuis longtemps ; il s’affaisse : ses murailles sont bien encore debout, noires et grenues comme la cotte d’un homme d’armes, mais la mousse et le lierre comblent les embrasures des créneaux. Ses quatre énormes tours dominent lugubrement les remparts ; l’une d'elles, chancelante et inclinée, porte à sa base les traces de la sape. N’était cette noble balafre, l’antique manoir aurait conservé peu de chose de son aspect guerrier ; l’édifice intérieur est neuf et de style moderne ; c’est un immense corps de logis sans ailes, production de cette lourde et disgracieuse architecture des années de l’ère impériale. À voir cette grande maison blanche, grossière copie des hôtels de la rue de Rivoli, entourée de sa glorieuse enceinte, on pense involontairement à la figure que ferait un de nos seigneurs de la Bourse sous l’armure d’un bon chevalier.

Jusqu’à la révolution de 89, Goëllo resta une des plus fortes châtellenies de Bretagne. L’étang de Vertus formait le centre des domaines. Il est situé au bas de la colline, dans la direction de Hédé, et fait maintenant partie des biens de la commune. Cet étang offre une particularité remarquable : il est alimenté par un cours d’eau souterrain ; on sait vaguement dans