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pourra me pousser dans le monde, puisqu’elle m’a déjà mis en relations avec des gens que je n’aurais jamais approchés sans cela ; exemple : Mme la marquise d’Ornans, Mme la comtesse Corona (un joli brin celle-là, ou que le diable m’emporte !), le colonel Bozzo, qui est dix fois millionnaire, M. de Saint-Louis, qui succédera peut-être à Louis-Philippe, et d’autres encore.

— Je vous en prie, prononça tout bas la veuve, parlez-moi de Fleurette.

— Et de Maurice, pas vrai ? interrompit M. Constant avec un bon gros rire ; vous n’êtes plus toute jeune, mais il y en a de plus déchirées que vous, et il paraît que le lieutenant est joli comme un amour. Moi je ne le connais pas, je dis seulement que s’il est moitié aussi beau que mademoiselle Valentine est belle, ce doit être un Adonis ! Ne vous impatientez pas, j’arrive à l’objet de ma visite.

Son doigt martela par trois fois, à petits coups bien espacés, le milieu de son front, et il ajouta :

— Le docteur Samuel dit que ça pourra guérir avec des soins et du temps, mais elle l’est… tout à fait.

— Pauvre Fleurette ! balbutia la veuve, qui resta bouche béante.

— Hélas ! oui, comme un beau petit lièvre, et soyons justes, il y avait bien de quoi toquer une jeune personne de cet âge-là, quoiqu’elle n’ait pas été élevée dans du coton. Mais ne vous faites pas trop de mal, vous savez, on la soigne à la papa, et il n’y en a pas deux comme le docteur Samuel dans Paris pour traiter les maladies de cette espèce-là. Elle n’est pas méchante, tout le monde l’adore à la maison, tous les jours elle reçoit des visites de vicomtes,