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tin exerçait un talent naissant qu’il avait sur le tambour ; Mlle Colombe cassait les reins de sa petite sœur et lui désossait proprement les rotules. L’enfant avait de l’avenir. Elle pouvait déjà rester trois minutes la tête contre-passée en arrière entre ses deux jambes, et jouer ainsi un petit air de trompette.

Pendant la fanfare, Mlle Colombe essayait quelques coups de sabre avec un pauvre diable à laideur prétentieuse, que coiffait un chapeau gris planté de côté sur ses cheveux jaunes et plats.

Celui-là se tenait assez bien sous les armes. Quand Mlle Colombe reprenait sa petite sœur, il allait à deux grosses filles rougeaudes qui déjeunaient avec deux énormes tranches de pain beurrées de raisiné, et leur donnait des leçons de danse américaine.

— Plus tard, disait-il aux deux rougeaudes, qui suivaient ses indications avec une paresse maussade, quand le succès aura récompensé vos efforts, vous pourrez vous vanter d’avoir eu les leçons d’un jeune homme qui en possède tous les brevets de pointe, contre-pointe, entrechats, respect aux dames, honneur et patrie, et vous pourrez passer partout rien qu’en disant : Nous sommes les élèves du seul Amédée Similor !

Le lecteur se souvient peut-être des deux postulants qui s’étaient présentés à Léocadie Samayoux, dans son ancienne baraque de la place Walhubert, le soir même de l’arrivée de Maurice Pagès revenant d’Afrique.

Léocadie, tout entière à la joie de revoir son lieutenant, avait renvoyé les deux candidats avec l’enfant que le pauvre