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la patronne, si elle n’avait pas l’inconvénient de cette passion-là !

Il s’approcha de la table sur la pointe du pied.

Il tenait d’une main son invention, de l’autre un vieux pinceau déplumé, abandonné au rebut par un des apprentis de l’atelier Cœur-d’Acier.

Mais ces objets ne faisaient qu’ajouter à l’expressive émotion de son geste, pendant qu’il contemplait, avec une admiration poussée jusqu’à la ferveur, le dos de Mme Samayoux.

Celle-ci avait laissé tomber une de ses mains ; comme sa tête restait appuyée sur l’autre main, on voyait le profil perdu de sa face rubiconde et chargée d’embonpoint. Ses cheveux très abondants, mais qui grisonnaient par place, s’échappaient de son madras aux nuances violentes, qui n’était pas de la plus entière fraîcheur.

Bien des gens vous diraient qu’à quarante ans passés, un jeune homme, pour employer les expressions d’Échalot quand il parlait de lui-même, ne peut plus avoir les sentiments d’un page.

D’autres pourraient penser que Léocadie Samayoux ne réalisait pas exactement l’idée qu’on se fait d’une châtelaine.

Et pourtant, je ne vois rien, en dehors des comparaisons chevaleresques, qui puisse donner une idée du culte respectueux, mais ardent, payé par ce pauvre diable à cette grosse bonne femme.

Malgré mon habitude de tout dire, j’hésiterais à exprimer là-dessus mon opinion, si elle n’était aussi sincère que mélancolique.

La voici :

En notre siècle si avisé, peut-être est-