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les rangs, maman ; je n’ignorais de rien, mais le cœur m’a manqué, quoi ! et j’aime mieux que la commotion vous vienne de Rudaupoil.

— On n’a jamais imprimé les noms tout au long sur le journal, reprit M. Baruque, qui bourrait sa pipe avec tranquillité. Dieu merci ! on prend des gants dans cette affaire-là, parce que ça touche à des familles huppées. Le feu juge lui-même est ordinairement couché dans les feuilles publiques en abrégé. La demoiselle a nom Valentine de V… ; connaissez-vous ça ?

— Oui et non, répondit Léocadie ; je n’ai jamais su le nom, mais la personne…

Sa voix tremblait. Gondrequin lui serra la main en répétant :

— Fixe ! et du courage !

— Pour le jeune homme, continua M. Baruque en s’asseyant sur la table, on met Maurice P…

— Bien ! dit Mme Samayoux, qui se tenait immobile et droite ; merci, monsieur Baruque !

— Vous êtes une fière femme ! murmura Gondrequin.

— Et ici, poursuivit encore Baruque, ce n’est pas bien malin de compléter le nom, puisque les journaux l’avaient imprimé tout entier à l’occasion du premier meurtre.

Cette fois Mme Samayoux chancela sur son siège.

— Le premier meurtre !… balbutia-t-elle.

Il y eut un mouvement dans l’auditoire, où quelques-uns crurent que l’ignorance de la dompteuse était jouée.