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noncée est la seule planche de salut qui puisse exister pour Maurice. Maurice sera sauvé, cette fois, bien sauvé, si ces hommes tombent, car il ne craindra plus que la loi, et la loi ne l’ira pas chercher à trois mille lieues d’ici où je l’entraînerai !

Autour des grosses lèvres de Coyatier, il y avait comme un sourire.

— Pourquoi riez-vous ? demanda Valentine irritée.

— Parce que c’est cocasse, répliqua le bandit, de voir comme les beaux esprits se rencontrent. D’autres que vous ont eu une idée pareille… mais ne m’interrogez pas, ça nous mènerait trop loin. J’ai mon ouvrage et je vais prendre congé de vous.

— Sans me répondre ? s’écria Valentine. Me suis-je donc trompée ? N’avez-vous pas vous-même l’envie, le besoin de retrouver votre liberté ?

— Ah ! fit le Marchef, ma liberté !… peut-être.

Ces mots, comme l’accent qu’il mit à les prononcer, ressemblaient à une énigme.

— N’avez-vous pas besoin, continua la jeune fille, qui mettait toute son âme éloquente en ses yeux, de redevenir homme, de laver une bonne fois vos mains ensanglantées ?

— Ah ! fit encore Coyatier de ce même accent dont l’expression ne se peut traduire, vous les avez touchées, ces mains-là, vous êtes une crâne jeune personne !… Mais où les laver, mes mains, jeunesse, mes mains qui ont du sang ? Dans le sang ?

Le front et les joues de Valentine étaient de marbre.