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— Et la taloche vaudrait de l’argent au marché des gifles, pensa le cocher, qui avait déjà mesuré plusieurs fois avec admiration l’envergure de maman Léo.

— Vous avez raison, murmura Valentine, qui tendit la main à sa compagne ; j’ai oublié un instant mon rôle, mais il est bien près de finir, et je ne le reprendrai plus.

Elle abaissa la glace qui fermait le devant de la voiture pour dire au cocher :

— Rue du Mail, no 3, et brûlez le pavé, vous aurez un bon pourboire.

— Alors c’est toi qui commandes la manœuvre ? fit la veuve.

— Oui, répondit Mlle de Villanove.

Ce fut tout. Deux ou trois fois pendant la route, maman Léo essaya de renouer l’entretien, mais Valentine resta silencieuse et absorbée.

Quand la voiture s’arrêta à l’entrée de la rue du Mail, devant la maison no 3, Valentine sembla s’éveiller d’un sommeil.

— Tu connais quelqu’un ici, fillette ? demanda la dompteuse.

Elle s’interrompit pour ajouter :

— Mais qu’as-tu donc ? te voilà plus pâle qu’une morte !

Valentine répondit :

— Je ne suis jamais venue qu’une fois dans cette maison. J’y connaissais quelqu’un… quelqu’un de bien cher !

Elle se leva en même temps pour descendre. Maman Léo demanda encore :

— Faut-il rester ou te suivre ? As-tu besoin de moi ?

— Je suis bien faible, répliqua Valentine, ne m’abandonnez pas.