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que sa vie avec la mienne. J’aurai mon nom pour avoir mon mari, et ne craignez pas un trop grand retard : avant une demi-heure, je saurai comment je m’appelle et je pourrai prouver la légitimité de ma vengeance.

Elle s’était redressée si belle et si fière que maman Léo et Maurice la regardaient avec admiration. Il leur semblait à tous deux qu’ils ne l’avaient jamais vue.

Mais tout à coup sa physionomie changea, parce que le gardien reparaissait à la porte.

Elle secoua rondement la main du prisonnier en disant tout bas :

— Bonsoir, cousin, à vous revoir ! je sais bien qui est-ce qui ne fera pas tort aux provisions de la maman ce matin. De vous trouver comme ça dans la peine, ça m’a ôté l’appétit pour toute la journée. Venez, la mère !

Et elle poussa dehors maman Léo tout étourdie, mais sur le seuil elle se retourna.

Sa main toucha sa poitrine et ses lèvres, comme si elle eût envoyé à Maurice tout son cœur dans un dernier baiser.

Le fiacre attendait devant la porte de la prison. D’un regard rapide, Valentine interrogea les deux côtés de la rue et ne vit rien de suspect.

Elle monta la première.

Maman Léo dit au cocher en haussant les épaules :

— Voilà pourtant les gamins d’aujourd’hui !

Elle ajouta tout haut en montant à son tour :

— Que tu mériterais bien une taloche pour te comporter avec l’impolitesse de laisser une dame en arrière !