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Il ne s’agit ni de liens brisés ni de barreaux attaqués avec la lime, suivez seulement celui ou celle qui viendra et qui vous dira : Il fait jour.

— Leur mot d’ordre ! balbutia la veuve en pâlissant.

— Je vois que nous n’y allons pas par quatre chemins, dit Maurice avec une sorte de gaieté désespérée.

— Quand on prononcera ce mot à votre oreille, reprit Valentine, je serai là, bien près, et s’il y a péril, je le partagerai.

— Si c’est comme ça que tu le consoles… commença maman Léo.

— Un mot encore, interrompit Valentine ; pour se marier, il faut avoir un nom, et je n’en ai pas. Celui que je porte n’est pas à moi, j’en suis sûre.

— Saquédié ! saquédié ! s’écria la veuve, voilà ce qui me donne la chair de poule, c’est l’idée qu’on va perdre du temps à faire ce mariage, au lieu de filer au grand galop sur n’importe quelle route. Ces noces-là, moi, je les enverrais je sais bien où, et quant à l’histoire d’avoir ou de ne pas avoir un nom, dame ! quand il s’agit de la vie…

Les lèvres de Valentine touchaient en ce moment le front de Maurice.

— Je suis Mlle d’Arx, murmura-t-elle d’une voix si basse qu’on eut peine à l’entendre ; j’ai à venger mon père, j’ai à venger mon frère. Ils me croient folle, ils ont raison peut-être, car j’ai pris, moi, pauvre fille, un fardeau qui écraserait les épaules d’un homme. Ce n’est pas à une fuite que je vais, c’est à une bataille. Mon mari doit le souffle de sa poitrine à mon frère Remy d’Arx, mon mari doit être de moitié dans ma vengeance, et c’est pour cela que je ris-