Page:Féval - Maman Léo, 1869.djvu/22

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

troupier. Au beau milieu de son courroux, d’ailleurs légitime, l’idée qu’il allait perdre une bonne pratique avait surgi.

— Respect au beau sexe ! dit-il ; une invective tombant de la bouche d’une dame n’a pas les mêmes inconvénients que si elle avait été proférée par un interlocuteur de mon sexe. Rompez les rangs, puisque vous n’êtes pas de bon poil, maman Léo ; je n’ai jamais porté l’uniforme, mais j’en ai la galanterie… À la vôtre tout de même.

Il vida son verre. Mme Samayoux laissa tomber sa tête sur sa main.

— Assassiné !… dit-elle encore.

— C’est donc ça qui vous chiffonne ? reprit Gondrequin rendu à toute sa sérénité. J’avais eu un petit moment l’idée d’en faire un tableau, mais ça n’a pas eu le retentissement nécessaire pour l’effet. Les détails manquent, et je ne sais pas pourquoi la chose n’a pas eu le succès qu’elle méritait dans Paris. Je lis mon journal tous les soirs en prenant ma demi-tasse et j’ai cru d’abord qu’on allait avoir du joli, car les faits divers avaient l’air de mélanger cette histoire-là à celle de M. Mac Labussière, Meilhan et consorts, connus sous le nom des Habits-Noirs, mais l’arrêt est rendu maintenant dans l’affaire des Habits-Noirs, qui doivent être partis pour leurs destinations respectives, et n’ayant plus fantaisie de profiter de la chose pour en faire un tire-l’œil, j’ai retourné à mes affaires. La commande tient toujours, pas vrai, maman ?

La dompteuse fit un signe de tête affirmatif et pensa tout haut :

— Comment savoir la vérité ?

— Il n’y a pas commère comme M. Ba-