Page:Féval - Maman Léo, 1869.djvu/216

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sonne, mais pour ne pas faire monter trop de rouge au front des naïfs et par pure décence, ils continuent de jouer la comédie qui fit leur succès.

Ainsi en était-il du colonel Bozzo-Corona vis-à-vis de ceux qui le haïssaient mortellement et pourtant qui lui obéissaient en esclaves.

Sa main était sur eux, sa main tremblante, mais si lourde ! La diplomatie qu’il employait à leur égard, usée jusqu’à la corde, était, comme toutes les diplomaties du reste, une simple mise en scène destinée à pallier le fait brutal.

À savoir, la force de l’un et la faiblesse des autres.

Il y avait cependant un atome de vérité parmi cet amas de vieux mensonges qui avaient tant et tant servi. Le colonel avait été sincère en parlant du chagrin que lui causait la réparation de fourneau demandée par son locataire.

Cela est si vrai qu’au lieu de prendre avec lui, comme d’habitude, Lecoq, son inséparable, il avait fait monter Portal-Girard dans son coupé.

Il y a loin du boulevard des Filles-du-Calvaire à la rue Thérèse. Pendant tout le temps que dura le voyage, le colonel Bozzo, parlant avec une animation extraordinaire, traita la question du fourneau, se faisant expliquer plutôt dix fois qu’une la théorie des immeubles par destination et taxant d’absurdité la loi qu’on n’avait pas faite à sa fantaisie.

— Si j’étais plus jeune, dit-il, je serais capable, moi, de faire des barricades contre une énormité pareille ! Je ne suis pas maître de cela, l’injustice m’exaspère ! Comment ! pour un misérable loyer de 600 fr.,