Page:Féval - Maman Léo, 1869.djvu/197

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Fanchette comme ma portière caresse son chat !

— Et il l’a donnée au plus lâche coquin de la bande ! ajouta Samuel.

— C’est elle qui le voulut, répartit Lecoq. En ce temps, le comte Corona était beau comme un astre, et il chantait le rôle d’Almaviva dans le Barbier avec une voix qui valait cent mille écus de rente. Mais ne nous égarons pas dans les détails. Que le père aime sa Fanchette comme une perruche ou comme un bichon, peu importe, le fait est qu’il l’aime et qu’il lui a préparé un splendide avenir. Moi, qu’il n’aime pas, mais dont il a besoin sans cesse, je suis un peu l’esprit familier de sa maison ; il hésite à m’étrangler, parce que je le tiens comme une habitude, et il en est venu à ne pas faire plus attention à moi qu’aux meubles de son hôtel. J’ai en outre quelques petites intelligences dans la place, et la femme de chambre de ma belle ennemie, la comtesse Corona, me fait son rapport quotidien.

Voici ce que j’ai appris avant-hier. La veille, vers huit heures du soir, le Père avait eu une crise terrible. Son médecin, appelé en toute hâte…

— Comment ! son médecin ? interrompit Samuel.

— Ah ça, bonhomme, répliqua Lecoq, as-tu jamais cru que le Père avalait tes drogues ?

— Je l’ai toujours soigné en toute honnêteté, répondit sérieusement Samuel.

— Mais tu as toujours nourri l’espoir que, dans un cas pressant, il te suffirait d’une bonne potion pour en finir, et tu as fait partager ton espoir aux autres : il faut rayer cela de tes papiers.