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se reculant confuse, mais il a fallu que ça parte ; je n’ai pas pu m’en empêcher.

Mme la marquise d’Ornans riait en rajustant sa coiffure.

Samuel, le docteur en droit, et M. le baron de la Périère s’étaient rapprochés du prince, qui regardait cette scène avec attendrissement et murmurait :

— Le peuple ! ah ! le peuple français !

Le colonel Bozzo restait seul au coin de la cheminée.

— Il y a donc, reprit maman Léo, que je suis à vous, quoi ! corps et âme, et que je me jetterai au feu s’il le faut pour vous être agréable.

Comme elle achevait, son regard, en quittant la marquise, rencontra les quatre paires d’yeux des Habits-Noirs qui la guettaient fixement.

Elle ne broncha pas et fit la révérence en ajoutant :

— Comme de juste, je suis aussi toute au service de la compagnie. Voyons, usez de moi, que faut-il faire ?

On entendit derrière le cercle la petite toux du bon vieux colonel et ceux qui le masquaient s’écartèrent aussitôt avec respect.

— Merci, mes amis, dit-il, j’aime à voir ceux à qui je parle, et vous me gêniez, car je n’ai plus ma voix de vingt ans. C’est moi qui ai eu la première idée de faire venir cette excellente Mme Samayoux, c’est moi, si vous le permettez, qui lui donnerai ses instructions.

Tous les hommes s’inclinèrent en silence, et la marquise dit dans la sincérité de sa foi :

— J’allais vous en prier, bon ami, car vous êtes notre meilleur conseil.