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porte par où Mme la marquise d’Ornans et son cercle étaient sortis s’ouvrit.

— Eh bien ! demanda la comtesse Corona sur le seuil, avons-nous dit tous nos grands secrets ?

— Chut ! fit Mme Samayoux, qui se retourna, elle s’est endormie en parlant de lui.

La comtesse traversa la chambre sur la pointe des pieds et vint jusqu’au lit.

Elle baisa la main de Valentine, qui était glacée, et fixa sur la dompteuse un regard triste et doux.

— Ils s’aiment bien, murmura-t-elle, et celui qui est mort l’adorait. Sa folie est de penser que Remy d’Arx était son frère : vous a-t-elle parlé de cela ?

— Oui, répondit la dompteuse.

— Vous qui la connaissez depuis longtemps, pensez-vous qu’elle puisse être vraiment la sœur de Remy d’Arx ?

— Quand je la connaissais, repartit la dompteuse, elle s’appelait Fleurette. Je ne me doutais pas qu’elle eût un frère, mais je ne me doutais pas non plus qu’elle fût la parente d’une noble marquise et d’un colonel.

— C’est juste, fit la comtesse.

Elle ajouta comme malgré elle :

— On vous a payée, n’est-ce pas, en ce temps-là ?

La veuve lui saisit les deux mains brusquement ; ses joues étaient en feu.

— Elle a confiance en vous, dit-elle, et c’est une belle âme qui est dans vos yeux. Écoutez, je suis une pauvre femme, une misérable créature qui a peut-être fait le mal : oui, on m’a donné de l’argent, et je ne l’avais pas gagné ! oui, on est venu la chercher chez moi et j’ai peut-être eu tort