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LA MORT DE CÉSAR.

— Où diable est passé Rustaud ? disait le délégué dans le corridor ; on ne l’entend plus… Hardi, mon bellot ! hardi !

Rustaud n’avait garde de répondre. Le délégué s’impatienta. Pour comble de malheur, par une fenêtre de la galerie, il aperçut Lapierre qui, ayant réussi enfin à détacher ses liens, enfourchait le cheval de l’un des soldats et s’enfuyait au grand galop.

— Ça se gâte ! grommela-t-il.

Désormais les chasseurs marchaient à l’aveugle ; mais, conduits par Rustaud jusqu’à la galerie du second étage, ils ne pouvaient tarder longtemps à découvrir la fameuse chambre. C’est ce qui arriva en effet. Au bout de dix minutes, le délégué se trouva en face du cadavre du limier. Un peu plus loin, dans l’ombre d’une encoignure, il distingua les yeux flamboyants de César.

— Nous y voilà, camarades ! dit-il en se retirant prudemment derrière les soldats. Ce chien monstrueux a assassiné Rustaud, aux mânes duquel je rends la justice de dire qu’il est mort servant la patrie… Sondez ce mur. Le trou du blaireau n’est pas loin.

Les soldats s’avancèrent. César, le corps ramassé, les poils hérissés, aspirait bruyamment l’air. Son ventre touchait le sol. Ses yeux lançaient du feu. Le premier soldat qui voulut sonder le mur fut terrassé comme un enfant, puis César reprit son poste.

— Tirez ! cria le délégué : immolez ce monstre, défenseurs de la patrie !

Les soldats mirent en joue ; mais, à ce moment, la porte de la cachette roula sur ses gonds, et M. de Bazouge se montra sur le seuil. Il avait tout entendu, et, voyant sa perte désormais certaine, il venait faire tête au danger. En