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LES NUITS DE PARIS.

s’élevait au sommet des hauteurs de Chaillot, le prêtre étendit la main.

Les six vierges touchèrent les doigts de six guerriers, — et le peuple, qui s’asseyait à l’entour, se leva en criant la louange d’Esus, le dieu bûcheron, et du taureau Trigaranus, qui porte trois grues entre ses cornes dorées.

— Voici, dit le prêtre, voici le soleil qui adore Tarran, le roi des dieux, eu caressant les colonnes de son temple… L’heure est propice… enfants, approchez.

Le fiancé s’avança d’un côté, la fiancée de l’autre.

Le fiancé dit :

— Celle-ci est Ghella, fille de Thual le nautonnier, et de Pialla, qui est morte.

La fiancée répliqua :

— Celui-ci est Ar-Bel, qui ne connaît ni son père ni sa mère, mais qui est le frère d’Alarix, le guerrier !

— Ghella, fille de Thual, paît les troupeaux des Sénones, dit encore Ar-Bel.

— Ar-Bel, frère d’Alarix, vendange les vignes des Parisiens, répondit Ghella.

— Elle a seize ans.

— Il a dix-huit années.

— Je la veux pour femme.

— Je le veux pour époux.

Le soleil n’était déjà plus entre les trois men-hirs ; il avait glissé sous la colline.

La nuit venait. La couronne de futaies qui coiffait le front du mont Cétard, allongeait ses grandes ombres.

— Où est Thual, le batelier ? demanda le prêtre : — où est Alarix le guerrier ?

Thual se présenta aussitôt, mais non point Alarix.

Thual était un homme de cinquante ans, fort comme un bœuf