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INTRODUCTION.

levaient, — puis elle s’engagea, tremblante et bien heureuse, dans le bosquet qui bordait l’enclos des Filles-Dieu.

— Henri !… appelait-elle tout bas.

Le chevalier de Saulcy-Lagaronnays se nommait Henri.

— Henri !… Henri !

On ne répondait point.

— Maintenant qu’il est riche, songea la belle Baradère ; — serait-il infidèle ?

Elle frissonna depuis les boucles de ses doux cheveux jusqu’à la pointe de ses pieds mignons.

Puis elle eut honte d’avoir eu seulement cette pensée.

— Henri ! Henri !

On ne répondait point encore.

La belle Baradère s’assit au pied d’un orme.

— Il se sera attardé, pensa-t-elle.

Puis sa rêverie l’emportant, elle se donna tout entière aux espoirs enchantés de la jeunesse et de l’amour.

Une vie de bonheur, — un vaste horizon de baisers !

Un mari qui serait son amant toujours.

Une éternité de plaisirs et de sourires…

— Henri !… Henri !…

Mais pourquoi Henri ne répondait-il pas ?

Il faisait bien noir sous ces grands arbres.

Éléonore voulut se lever. — Pour se lever, elle appuya sa main contre terre.

Sa main rencontra quelque chose de tiède, dont le contact lui arracha un cri d’horreur.

C’était une main.

Une main inerte et roidie.

Elle la souleva, la main retomba.

Un pressentiment terrible serra le cœur d’Éléonore.

Elle se mit à genoux près du cadavre, — car c’était bien le corps