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INTRODUCTION.

— Eh ! cher monsieur, ajouta-t-il en s’inclinant vers la table où paissait Lagaronnays, — pardon si je m’adresse à vous sans façon… mais nous sommes de vieilles connaissances…

— Je ne me souviens pas… commença Lagaronnays.

Lamalgue prit un ton sentencieux.

— Mon cavalier, dit-il, quand deux joueurs gagnent ensemble sur la même veine…

— Oh ! oh ! interrompit Lagaronnays en riant, vous avez gagné sur la même veine que moi ?

Lamalgue frappa sur son gros portefeuille.

— Eh bien ! reprit Lagaronnays, je vous en félicite… elle était bonne, la veine !

Lamalgue, d’un geste plein d’emphase, frappa de nouveau sur son portefeuille.

— Est-ce que c’était vous, reprit le cadet du Maine, qui achetiez au coin de la rue Saint-Magloire ?

— C’était moi.

— Vous alliez bien, corbleu !

Lamalgue frappa pour la troisième fois sur son portefeuille et dit :

— Je me suis retiré faisant cinq cent mille livres.

— Juste la moitié moins que moi ! s’écria Lagaronnays, qui lampa triomphalement un vaste cornet de Champagne.

Car c’est dans ces bouges que naquit la grande et inexplicable vogue de cette affreuse piquette : le Champagne.

La régence inonda notre beau pays de Champagne et de mercure.

Lamalgue donna un coup de pied à d’Harmont par dessous la table.

Quelle magnifique aubaine !

On avait apporté des cartes.

Lamalgue et d’Harmont se mirent à jouer.

Ce qui ne les empêcha pas de continuer la conversation avec Lagaronnays qui dévorait toujours.