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INTRODUCTION.

la guillotine s’élevait et entassait, en quelques jours, plus de cinq cents têtes coupées.

Mais la vaillance parisienne purifia ce lieu des souillures de la Terreur ; la barrière du Trône fut, en mars 1814, le théâtre dur, de ces combats de géants que la garde nationale soutint contre les troupes russes.

Nous avons dit plus haut que, de tout temps, ce côté de Paris fut le berceau des guerres civiles, des insurrections et des sanglantes batailles.

Alors que le faubourg Saint-Antoine n’était encore qu’une route bordée de vieux arbres, alors que l’enceinte de Paris s’étendait à peine jusqu’à la Bastille, ces cohortes au courage indomptable, mais aveugle, qui poussent le premier cri de la lutte populaire, ne pouvaient descendre de si haut. — Elles sortaient du Paris bas et pauvre qui avoisinait les rives de la Seine, dépourvues de quais. Elles venaient derrière l’hôtel Saint-Paul, par la rue du Petit-Musc, par la rue des Jardins.

Elles massacraient le prévôt Marcel sous les murailles mêmes de la Bastille.

Elles envahissaient par trois fois le palais de Charles VI.

Elles arrivaient, ardentes et vaillantes, à la suite d’Armagnac ou dans les rangs de Bourgogne, frappant sans savoir, mais frappant toujours fort.

Et quelque soir, au temps où l’Anglais tenait la capitale de la France, elles s’élancèrent furieuses, ivres de patriotisme et de colère, — des hommes, des femmes, des enfants, — avec des bâtons, des couteaux et des torches, — elles s’élancèrent, ces cohortes en guenilles, et la rue Saint-Antoine fut jonchée de cadavres habillés de fer !


Tout Paris s’était rendu déjà aux soldats victorieux de Henri de Béarn, que la porte Saint-Antoine tenait encore.