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xxi
INTRODUCTION.

les, secouant trois torches étincelantes, — qui n’étaient autres que les trois feux d’artifice, transformés dans mon rêve.

Dieu nous garde d’aucune allusion politique, au début de ce livre qui ne contiendra pas une seule ligne de politique !

Mais il faut bien que je dise mon rêve.

Ils volaient, ces trois génies, vers un point commun qui semblait être le centre de Paris.

C’était comme s’ils eussent voulu arriver chacun le premier au cœur de la cité, afin de s’emparer de ce cœur et d’être le maître.

Tout en allant, ils se menaçaient du regard et leurs torches, secouées, remplissaient l’air d’étincelles.

Le premier, celui qui venait du faubourg Saint-Antoine, portait une épée avec sa torche. Peut-être avait-il pris en passant les chaînes brisées du génie de la Bastille.

Son visage était rude. Sa torche lançait de rouges éclats.

La peau dure et calleuse de son corps avait à peine un voile grossier. — De ces haillons, sortait le manche sournois d’un poignard.

Le second génie, celui qui passait sur la chaussée d’Antin, avait une bien meilleure tournure.

Il ne portait point d’épée, mais bien quelque chose qui ressemblait à un portefeuille de courtier.

Sa figure était douce, souriante, — un peu plus même.

Cette figure, en effet, provoquait comme le visage des prêtresses de Vénus.

Et je crois vraiment que ce génie était une femme.

Homme ou femme, c’était un génie merveilleusement habillé d’argent, d’or et de pierres précieuses. Sa ceinture entr’ouverte laissait tomber des louis et même des actions de divers chemins de fer.

Mais, par un mécanisme réellement miraculeux, sa ceinture flottante avait des griffes au lieu de franges. — Ces griffes rattra-