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LES NUITS DE PARIS.

À la seule inspection des entrailles, il s’écria :

— Victoire !

Et Julien et les autres, de répéter avec dévotion :

— Victoire !

Savez-vous ? il y avait dans le foie du malheureux Robin-mouton une tache constellée, et sa rate portait deux raies transversales, ô bonheur !

Ô fortune ! le même mouton avait un petit caillou dans l’intestin grêle, ce qui prouvait non-seulement que ce quadrupède avait pu souffrir de la gravelle, mais encore que les dieux favorables protégeaient le césar Julien !

Mais ce que nous ne vous disions pas, ce que vous nous reprocheriez éternellement de vous avoir dissimulé, c’est que l’os pectoral fléchissait à gauche.

Oui, lecteur, à gauche et non pas à droite.

Ô fortune ! ô victoire ! ô César très-heureux !

L’os du mouton fléchissait à gauche.

Si l’os eut fléchi à droite, vous comprenez que tout aurait été perdu.

Mais non ! oh ! grâce aux dieux immortels, l’os fléchissait à gauche.

César heureux trois et quatre fois !

Aprunculus, l’augure, se promit bien de faire un haricot de ce mouton. Et c’était le moindre honneur qu’on put rendre à une bête si recommandable par ses infirmités.


Il ne restait plus qu’à consulter les astres, mais vous sentez, après l’affaire du mouton, c’était une formalité pure.

Le mouton est innocent. Son ingénuité ne sait pas altérer la simple vérité. Ne vous défiez jamais que du veau !

— Si les dieux me protègent, s’écria Julien avec émotion, qu’ils