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LES NUTIS DE PARIS.

— Demain, la lettre de Constance arrivera… Tenez-vous prêts.

— Par Jupiter ! s’écria Léon le scutaire en riant, — car je suis chrétien, c’est vrai, mais Jupiter était un dieu joyeux qui choisissait ses maîtresses parmi les femmes amoureuses des cygnes et des taureaux… C’est tout de même divertissant de voir détaler un troupeau de syllogismes !

Valentinien lança son javelot sans dard qui alla rebondir sur le dos voûté de Chrisidès.

Le dernier des philosophes disparut dans la nuit en hurlant.


II

Les feux s’éteignirent peu à peu dans le camp et dans la ville improvisée qui entourait ses murailles. Ces armées gallo-romaines, vaillantes, mais turbulentes, avaient cela de bon qu’elles adoraient leurs chefs. L’élément gaulois réchauffait un peu le sang abâtardi des Romains. Il y avait là de l’enthousiasme, et dès qu’un chef aimé avait parlé à ces mutins, les plus incorrigibles d’entr’eux s’inclinaient, obéissants.

Valentinien, le rude héros, Maldio, l’hercule au visage de jeune fille avaient l’amour du camp tout entier.

Les tentes étaient fermées ; le silence le plus profond régnait dans l’enceinte ; les sentinelles immobiles veillaient.

C’était une nuit étoilée, mais sans lune. C’est à peine si l’on distinguait sur le ciel sombre la noire silhouette du palais des Césars.

Dans le palais comme au camp, tout dormait. Sur toute la surface des hautes murailles, on ne voyait briller que deux lumières, à travers les épaisses draperies.

L’une de ces lueurs apparaissait au sommet de l’édifice princi