Page:Féval - Les Nuits de Paris - 1880, volumes 1 et 2.djvu/190

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
92
LES NUITS DE PARIS.

— À César !

Les soldats applaudirent.

— Et maintenant, amis, reprit Valentinien, — l’heure du festin est passée… à vos tentes !

Le scutaire Léon ouvrait la bouche pour répondre et peut-être allait-il dire quelque chose du sujet de la récente conversation, mais Turnion lui serra le bras.

— Ils n’en sont pas !… murmura-t-il.

Le scutaire se tut.

Et comme les soldats se dispersaient pour regagner leurs quartiers, les hommes à besace, qui s’étaient cachés derrière eux à l’approche des deux jeunes chefs, se trouvèrent tout à coup en vue.

— Qu’est cela ? s’écria le tribun en fronçant le sourcil : — la loi militaire défend l’entrée du camp aux histrions et aux mendiants.

Péripatéticiens, stoïciens, sceptiques et autres n’ouvrirent pas la bouche.

Valentinien était connu pour ne pas aimer ces industriels à barbes sales.

— Tribun, dit le décurion avec respect ; ce sont des philosophes et César les protège.

— Que César leur ouvre donc son palais ! répliqua rudement Valentinien ; — César est notre maître et mon ami, mais la discipline militaire est le salut de l’empire.

— Hors d’ici ! s’écria-t-il en levant la javeline dorée et sans dard qu’il portait à la main.

Les philosophes épouvantés s’enfuirent comme une troupe d’oies.

Maldio se tenait les côtes en les voyant se pousser et tomber les uns sur les autres dans leur retraite précipitée.

Chrisidès eut cependant le temps de glisser à l’oreille de Turnion.