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LES NUTIS DE PARIS.

Il n’acheva pas, parce qu’un mouvement se fit dans la foule des légionnaires.

Des acclamations éclatèrent en même temps de toutes parts.

À la lueur des torches portées par des esclaves, deux beaux jeunes gens, sortant du prétoire, s’avançaient la tête nue et les bras entrelacés.

C’étaient le tribun des soldats Valentinien et le comte Maldio, maître de la cavalerie indigène.

L’un officier de fortune, fils d’un corroyeur de Pannonie, l’autre descendant des rois barbares.

Les cheveux noirs et courts de Valentinien se frisaient sur son front bombé où déjà les soucis du commandement avaient creusé des rides précoces. La chevelure blonde du prince germain tombait en boucles gracieuses sur sa chlamyde d’azur.

Ils étaient jeunes tous deux, tous deux plus braves que des lions, tous deux adorés des soldats, savoir : Valentinien le tribun pour sa rigoureuse équité, le comte Maldio pour sa chevaleresque vaillance et sa générosité.

Quand ils approchèrent, fantassins et cavaliers, Herules et Pétulants s’écartèrent avec un affectueux respect.

Les deux chefs s’arrêtèrent devant la table couverte de coupes humides encore.

— Amis, dit le beau Maldio, vous avez fêté comme il faut le vin de César !

— Il en reste encore assez, répliqua Léon, le scutaire, pour que vous buviez dans nos coupes à la santé de César.

Maldio garda son sourire mais il devint un peu pâle.

Valentinien prit une coupe et l’emplit :

— À César ! dit-il de sa voix rude et retentissante, — puisse le Dieu des chrétiens lui donner une belle vie et une bonne mort.

Maldio et lui choquèrent leurs coupes, tandis que Maldio répétait :