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LES NUITS DE PARIS.

eût été déjà, ainsi que sa centurie, hors de la portée des Gaulois confédérés.

Mais en laissant partir l’armée, le centarque n’avait eu d’autre pensée que de passer une bonne nuit d’orgie, après avoir envoyé aux enfers ses deux ennemis, l’affranchi et l’esclave.

Il avait réussi quant à Œlian et à Mysœïs ; mais pour la nuit d’orgie, c’était autre chose.

Nous devons lui rendre cette justice, de dire qu’il comprit tout de suite sa position. Il devina que les Gaulois étaient dans l’ile, et il ne songea qu’à déguerpir.

Les cris qu’il avait entendus, les clameurs qu’il avait prises pour les bruits du festin, c’était sans nul doute ses triaires qu’on égorgeait.

Il n’y avait donc plus à s’occuper des triaires.

Corvinus s’élança hors de la chambre et se reprit à parcourir, fou d’épouvante cette fois, les sombres corridors de la forteresse.

Il ne s’y reconnaissait plus.

Après bien des détours, il s’arrêta tout à coup devant une porte qu’il poussa, et il se trouva dans la salle des thermes, devant ces corps blancs comme neige, demi plongés dans l’eau sanglante…

Il se couvrit les yeux et s’enfuit comme un insensé.

Par les fenêtres, il voyait maintenant des feux courir dans l’île. Les barbares étaient là. Alarix le cherchait pour sa femme Arrhéda assassinée.


Alarix ! oh ! le guerrier terrible !

Alarix le cherchait en effet.

Pour quitter l’ile, il n’y avait qu’un chemin : le pont de bateaux.

Alarix était en tête du pont de bateaux avec sa hache à long manche, — la même hache qui avait coupé la couronne de laurier sur la tête de César.