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INTRODUCTION.

cheveux d’emprunt, beaucoup de pommade mélaïnocome, et d’énormes parties de blanc végétal, fait avec de purs minéraux.

Mais le soleil odieux n’est plus là pour montrer ces chers artifices.

Paris est beau ; il retrousse sa moustache luisante ; il effleure le pavé de son pied verni ; — il se balance, tout chargé de diamants, de plumes, de fleurs, au trot triomphal des grands chevaux de son équipage.

N’est-ce pas la nuit que Paris dîne et danse ?

N’est-ce pas la nuit que Viardot, Alboni, Ulgade enfilent les perles de leurs chansons ? N’est-ce pas la nuit que Ceritto ouvre ses ailes ?


III.

Et tandis que le boulevard étincelle, tandis que les grands magasins rayonnent, étalant leur or et leurs cristaux éblouissants, — tandis que les chevaux piaffent à la porte des théâtres, — tandis que le Champagne se frappe et que la truffe politique jette ses parfums provocants par la bouche des soupiraux, — tandis que le Paris brillant goûte à toutes les joies, essaye de toutes les ivresses, il y a un autre Paris qui a faim, qui a soif, qui a froid, qui souffre.

Ville magnifique et cité misérable !

Monstre dont la tête se couronne de perles et qui a ses pieds dans la boue.

Jouissances effrénées, douleurs sans bornes !

Tant qu’a duré la dernière lueur du crépuscule, là-haut, près de cette fenêtre ouverte sur les toits, une pauvre enfant, une noble fille, a fatigué ses yeux pour épargner la chandelle qui coûte un sou.