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LES NUITS DE PARIS.

Seulement, quand on les conduit, pour ce, en cour d’assises, ils répondent en pur langage universitaire « qu’ils ont obéi aux lois de la nature. »

Tel était l’avis de Caïus Corvinus. Un coup de pommeau d’épée vaut toutes les séductions de la terre pour un garçon qui comprend ainsi et qui respecte les lois de la nature.

Corvinus avait laissé Arrhéda évanouie sur le bord du chemin.

Il passa beaucoup d’autres centarques qui avaient, comme Corvinus, des idées avancées et pas de préjugés.

Vers le matin, Arrhéda était morte au revers de la route.

Des pâtres vinrent chercher Alarix à la ville des Carnutcs et lui montrèrent sa femme, morte ainsi d’une mort qui révolte le cœur.

Ce digne Corvinus avait pourtant juré devant l’autel de Cernunnos :

— Ce n’est pas moi ! ce n’est pas moi !

Mais tout mauvais cas est niable.

Et cela ne l’empêchait point de rôder autour de la pauvre petite Ghella, ayant toujours au côté l’honnête épée dont le pommeau lui tenait lieu de philtre amoureux.


VIII

Le lendemain matin les collines qui entourent le bassin de Paris présentaient l’aspect d’une morne solitude.

Toutes les cabanes, bâties à la hâte par ce peuple de Lutèce, chassé de ses foyers, étaient désertes. Il n’y avait plus ni hommes ni femmes. On avait emmené jusqu’aux enfants.

Cependant Ar-Bel s’éveilla dans les bras de Ghella, au fond du nid moussu, sous les grands chênes, derrière les ormes mariés aux vignes luxueuses.