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LES NUITS DE PARIS.

qui suit les orgies de la force. Elle n’en est pas encore aux hideuses convulsions du libertin agonisant.

Non. — Et nous ne sommes pas non plus aux robustes délires de ces temps jeunes et barbares qui vinrent après le Bas-Empire.

Nous y viendrons, à ces temps de vices virils et barbares où l’amour glissait volontiers dans le sang.

Nous sommes maintenant à l’époque où Rome, affadie par les réminiscences grecques, se couronnait des roses fanées d’Anacréon ; à l’époque où la débauche souriait, déjà lasse, mais pas encore épileptique.

La fatigue excluait la violence.

Le vice, franc et sans voile, suivait en quelque sorte la loi de la statuaire antique, qui défend tout mouvement désordonné.

Œlian et Mysœis étaient, croyez-le bien, les meilleurs jeunes gens du monde !

Le soir, dans la salle du festin, couchés tous deux sur le même lit que César, Œlian et Mysœis parlèrent de Ghella et d’Ar-Bel.

Leurs libations furent adressées aux dieux dans le but d’obtenir le plaisir facile.

Ar-Bel et Ghella étaient mariés depuis une heure ; — mais c’était un si franc effronté que cet Hymen païen !…

Ils causaient encore amour, l’affranchi et l’esclave, que César était retiré déjà dans l’appartement solitaire où ses nuits se passaient à l’étude.

Car celui-là savait mener de front le vice et la vertu.

Ils causaient encore, Œlian et Mysœïs, ils causaient encore de la timide Ghella et d’Ar-Bel aux blonds cheveux, que César, averti par un soldat, montait à la plate-forme de la forteresse et embrassait de son coup d’œil d’aigle cet horizon gaulois où la menace était écrite de toute part en caractères de feu.

César connaissait ce terrible langage.

Œlian et Mysœïs dormirent en se tenant par la main.