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LES NUITS DE PARIS.

fille Ghella, c’est que tu es le frère d’Alarix… L’épée qui prendra la dernière goutte du sang d’Alarix n’est pas encore forgée !… Les dieux aiment la vaillance et protègent les vaillants.

— Quelqu’un de vous, Parisiens, ajouta-t-il en élevant la voix, quelqu’un de vous veut-il jurer le serment paternel pour le frère de notre Alarix !

Vingt réponses se croisèrent qui toutes disaient :

— Moi ! moi !

Mais une réponse devança les autres et une voix éclatante répondit en langage latin.

Me ! Me ! adsum qui volo !

Un silence mortel se fit.

Un homme de haute taille, revêtu de la cuirasse romaine et portant les insignes de centarque, était debout derrière l’autel.

Il avait passé sa main rude sous le menton de Ghella, et son œil ardent semblait dévorer la beauté de la jeune fille.

Tout ce qui portait barbe, dans l’assemblée gauloise, fronça le sourcil. Les femmes frémirent. — Ar-Bel était devenu plus pâle qu’un mort.

— Qui es-tu ? demanda le prêtre qui ne semblait pas très-rassuré.

— Je suis citoyen romain, répondit le nouveau venu, qui, en vérité, se pencha galamment pour mettre un baiser sur le front de Ghella.

Ar-Bel s’élança entre lui et sa fiancée.

— Je suis en outre, continua l’intrus, centarque des triaires de la dixième légion, dont chaque centurie vaut une armée de barbares… Je m’appelle Caïus Corvinus, et j’ai un oncle chevalier romain !

Ces derniers mots furent prononcés avec une emphase tout à fait impériale.

— Quant à ce qui te regarde, enfant, reprit-il en se tournant