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Et ils ne s’étaient point trompés.

D’un mouvement rapide comme l’éclair, Lecoq, après avoir lâché les reins de son libérateur, lui planta un coup de couteau à la hauteur de la poitrine. Son couteau rencontra le vide, pendant qu’il prononçait les paroles que nous venons d’écrire, et la voix de l’estropié répondit au ras du sol.

« Patron ! vous m’avez laissé tomber. »

Lecoq, guidé par le son, se jeta sur lui à corps perdu.

« Eh bien ! eh bien ! dit encore la voix calme de Trois-Pattes à plusieurs mètres de distance, est-ce ainsi que vous me remerciez, patron ! »

M. Roland secoua la porte qui résista. M. Lecoq ouït le bruit et bondit de ce côté. Il vint, dans sa fureur, se heurter contre le grillage où il croyait trouver sa victime.

« Ici, fit alors Trois-Pattes comme on parle à un chien. Ici, Toulonnais-l’Amitié ! on t’attend ! »

Cette fois, la voix sortait à hauteur d’homme.

M. Lecoq bondit de nouveau en poussant un rugissement rauque. Le prétendu Trois-Pattes le reçut de pied ferme ; il y eut un choc sourd, puis le bruit d’une lutte violente.

Foudroyante, devrions-nous dire, car elle ne dura qu’un instant.

Un râle passa dans les ténèbres.

« Est-ce vous, monsieur Maynotte ? demanda le conseiller malgré lui. Êtes-vous blessé ?

— C’était donc bien lui ! grinça celui qui râlait.

— C’est moi qui ai le pied sur la gorge du coquin, répondit André, donnant toute la mâle ampleur de sa voix. Soyez sans inquiétude. »

M. Roland reprit après un silence :

« Ne le tuez pas : cela regarde la justice. »