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Lecoq essayant de railler, pour te voir ainsi tondu et rasé ! Tu dois être drôle !

— Ça pourra venir, patron. Nous sommes au dixième clou. Moi qui ne suis pas si riche que vous, je donnerais moitié : douze sous et demi, pour connaître les trois licous que ce coquin de Bruneau a autour de la gorge. Ne bougez pas et tenez bon !

— Le premier, répliqua complaisamment Lecoq, le dernier par ordre de dates, c’est l’accident de la comtesse Corona… va ! ton Bruneau serait bien reçu à la préfecture ! Le second, c’est sa condamnation de Caen qui pèse sur lui comme au premier jour ; le troisième enfin, et le meilleur des trois, c’est la condamnation de sa femme…

— Bah ! l’interrompit Trois-Pattes. La baronne Schwartz n’est plus sa femme !

— Il n’a jamais cessé de l’aimer.

— Vous croyez ? Baissez un peu le coude.

— J’en suis sûr.

— Depuis dix-sept ans ! Quelle constance !

— Il y a des troubadours ! » fit M. Lecoq.

Sa voix changea pendant qu’il prononçait ces mots.

Et presque aussitôt après, comme s’il se fût complu désormais à parler, il ajouta :

— Sans l’idée que nous eûmes, le colonel et moi, de lui donner le change en dirigeant ses soupçons sur le Schwartz, qui sait ce qu’il eût tenté contre nous ? C’est un mâle, après tout. Il a su éviter la potence à Londres comme le bagne en France. Mais, contre deux lapins comme moi et le colonel, il faut plus qu’un mâle. Sans l’approcher, nous fîmes tomber une charretée de sable dans ses yeux : le baron Schwartz était à Caen la nuit du vol, Maynotte le savait ; le baron Schwartz, un an après, avait quatre cent mille francs quand il épousa