comme une pure affaire de famille, qui n’aurait pour but que la prospérité de son établissement privé ; c’est là le vice de ses qualités : bon père, bon époux, vous savez, l’homme déborde en lui trop énergiquement le souverain… La seconde, c’est que le régime tout entier est basé sur un compromis, moins que cela, car le compromis n’a jamais été signé : sur une subtilité. Cela ressemble, je ne dirai pas à un palais, nous sommes modestes jusqu’à l’humilité à la cour quasi-légitime, mais à une énorme maison dont les murs en pierres de taille reposeraient sur un pilotis vermoulu. Il n’y a point ici de foi, parce qu’il n’y a point de dogme. On vit au jour le jour ; on se fait accroire à soi-même qu’attendre est la science suprême, et qu’un trône, à la longue, se prescrit comme un champ. À la rigueur, ce n’est pas impossible, car le monde est bien vieux et retombe en enfance. Or, aux premiers âges du monde, le sceptre n’était qu’un meuble pour lequel longue possession valait titre. Ce qui nous semble erreur n’est peut-être que mépris. J’arrive à douter et je regarde. Si cette royauté, une fois majeure, grandissait tout à coup jusqu’à l’absolutisme ?… Mais je divague, et vous ne m’avez pas demandé l’article que fera le Journal des Débats au lendemain d’une révolution. »
Il s’arrêta brusquement. M. Lecoq, qui l’avait écouté avec une attention marquée, lui fit un petit signe de tête protecteur.
« Vous parlez d’or, au contraire, monsieur le marquis, dit-il. Je vois en vous le légitimiste d’hier…
— Et le républicain de demain, allez-vous dire ? l’interrompit le gentilhomme, qui rouvrit son porte-cigare d’un geste délibéré. Vous vous trompez ; je suis de qualité ; je vais à pied ou bien je reste à la maison plutôt que de monter en omnibus. »