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Nous faisons des affaires, nous sommes ensemble dans de bonnes relations. Cher monsieur, par état, j’ai un grand nombre de ces relations, les unes, placées beaucoup plus bas que vous ; les autres encore plus haut peut-être. Entre les unes et les autres, je tiens tout simplement mon niveau à moi, qui me convient et dont je me contente. Je suis M. Lecoq, de la Perrière si vous voulez, je n’y tiens pas énormément, un industriel, ni plus ni moins. Il m’est précieux de savoir très exactement ce qui se passe dans les ministères et à la préfecture, parce que j’ai de grands intérêts engagés… des intérêts immenses. Vous êtes un de ceux qui me fournissent des renseignements excellents et je vous en tiens compte. Mais quant à redouter personnellement les ministères ou la préfecture, non. Si j’étais attaqué ici ou là, j’évalue à plus de cent mille écus la publicité que cette ânerie me produirait. Puis-je espérer que vous êtes désormais fixé là-dessus ? »

Ces choses furent dites d’un ton rassis et en quelque sorte scandées selon de savants intervalles.

Le marquis lança au feu son cigare et se leva.

« Il faut vous prendre comme vous êtes ! murmura-t-il en homme qui préfère la retraite à une lutte de paroles inégales.

— Permettez, fit M. Lecoq. Nous n’avons pas fini.

Mme la baronne s’impatiente, » ricana le marquis, heureux de railler.

Entre l’index et le pouce, M. Lecoq tenait effrontément la note de Piquepuce.

« Ce n’est pas une spéculation que je veux vous soumettre, dit-il, caressant son débit, quoiqu’il y ait bien quelque argent sous l’idée. Dans les bonnes idées il y a toujours de l’argent. Veuillez prendre la peine de vous rasseoir. »