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jeune fille et des larmes baignaient la splendeur de ses yeux.

« Elle est ma mère, » avait dit Michel dans un baiser.

Et vous comprenez tout, comme elle avait tout compris, elle Edmée ; il suffit d’un mot pareil qui éclairé comme la foudre. La douleur enfuie faisait place à une profonde allégresse.

Sa mère, pourtant ! Elle, la baronne Schwartz, si jeune, si merveilleusement belle ! Un doute venait, et c’est le charme exquis de ces explications. Le doute prolonge la bien-aimée jouissance.

Edmée disait :

« Blanche n’a que quinze ans, et déjà Mme Schwartz me semblait trop jeune pour être la mère de Blanche ! »

En même temps elle frémissait avec délices à la pensée de ses angoisses guéries.

« Mais comme je vais l’aimer, Michel, votre mère ! »

Puis elle se souvenait : ce regard calme de la baronne, cette hautaine douceur.

« Ah ! j’aurais dû comprendre ! »

Puis encore elle doutait pour la millième fois.

« Mais dites-vous vrai ? Ne jouez pas avec cela, car j’ai rêvé de mourir ! elle est trop belle… trop jeune…

— Certes, certes, murmurait Michel en s’enivrant des virginales étincelles qu’épandait ce regard d’amante ; elle est bien jeune, elle est bien belle,… Mais comment ai-je pu rester si longtemps loin de toi, Edmée, mon âme chérie ?

— Oui, comment ?… et pourquoi, Michel, pourquoi surtout ? Ah ! je suis seule à aimer ! »

Il refoula ce blasphème d’un baiser. — Comment dire cela ? d’un baiser d’époux, bien franc et bien ferme, délicieux et chaste bâillon que les deux mains d’Edmée pressèrent passionnément sur ses lèvres.