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Puis encore :

« Tout ce que tu feras, je le ferai ; où tu iras, j’irai ; ton sort sera le mien : je suis ta femme.

— Tu es mère aussi, » murmura André qui la regardait en extase.

L’éclair s’éteignit dans les yeux de Julie.

« Pourquoi n’as tu pas emmené le petit ? demanda-t-elle.

— Tu l’as dit toi-même, répartit André doucement : on se cache un jour, deux jours… »

Elle l’interrompit dans un baiser plein de larmes, disant :

« Si tu me sépares de toi, je mourrai ! »

Et certes, elle était sincère ; André le sentait aux battements de son cœur.

« Tu vivras pour ton mari et pour ton fils, répliqua-t-il.

— Alors, s’écria-t-elle en s’arrachant de ses bras, c’est bien la vérité ? J’ai deviné ton dessein ! tu veux rester seul en face de notre malheur ! »

Ce fut d’une voix ferme et presque sévère que le jeune ciseleur répondit :

« Oui ; je veux rester seul. Et je dis je veux pour la première fois depuis que nous sommes mariés, Julie. Quand même l’idée de fuir à trois ne serait pas insensée, je ne me résoudrais pas à fuir. Mon père n’était qu’un pauvre homme, mais il m’a laissé un nom sans tache, et sans tache je dois léguer son nom à mon fils.

— Tu espères donc ? » demanda Julie attachant sur lui ses grands yeux inquiets.

Comme il gardait le silence, elle ajouta en un véritable élan de passion :

« Si tu espères, pourquoi me chasser ?… »

« Mais non ! s’interrompit-elle, tu n’espères pas ! Ta