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leur qui lui fit faire le tour de la cour pour avoir du champ. Bien lui en prit, car Mme Schwartz était déjà à la fenêtre de la rue, poussant des cris d’aigle et disant :

« Au voleur ! à l’assassin ! au feu ! »

Black, lancé du premier coup à toute bride, franchit la voûte d’un élan. Les hommes de police qui étaient là s’effacèrent contre la muraille. Ceux de la place des Acacias, ainsi que les gardes de ville et les gendarmes, avertis par Mme Schwartz et par le commissaire lui-même qui avait rejoint sa femme et qui se démenait à sa fenêtre sur le devant, se portèrent comme il faut à leur devoir. Mais ce Black était un diable. Il passa près d’eux comme un tourbillon et tourna l’angle de la place, tandis qu’un concert de voix clamait :

« Arrêtez ! arrêtez ! »

Il eût fallu pour cela un rassemblement barrant complètement la rue ou quelqu’un de ces hardis citoyens qui se jettent les yeux fermés au-devant du péril ; je dis les yeux fermés, car tout œil ouvert eût vu dans la main droite d’André, qui tenait à présent les rênes de la main gauche, un pistolet haut et armé, — et derrière le pistolet une pâle figure qui menaçait plus terriblement que l’arme elle-même.

André était droit et ferme sur le siège. À son épaule s’appuyait la tête de sa femme évanouie.

Il était de bonne heure encore et les passants allaient rares dans la rue. Il ne se trouva aucun héros disponible pour barrer efficacement la route au tilbury. Pendant que Mme Schwartz, hors d’elle-même et manquant l’occasion de venger en une seule fois tous ces jugements où Pâris caennais ne lui avait pas décerné la pomme, se démenait, criant : « les hommes sont des lâches ! » Pendant que M. Schwartz, plus sensé, met-