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boutique ou chambre à coucher, l’entrée principale donnant sur la place des Acacias, et une petite entrée latérale qui s’ouvrait sous la voûte de la porte cochère. André voulut voir comment la maison était cernée. Il retira sans bruit une des chevilles de fer de la devanture et mit son œil au trou. En face de lui, cinq personnages, en habit bourgeois, s’asseyaient sur un banc ; deux gendarmes étaient debout sous les arbres et quatre gardes de ville se promenaient en longeant le trottoir.

Il remit la cheville et retira la clé de la petite porte latérale. Par la serrure, il ne put rien voir, sinon un large dos, mais il entendit.

Sous la voûte, il y avait au moins quatre gardes à l’affût.

Cependant, rien n’avait transpiré encore dans le public, car la promenade était tranquille, et la présence de la force armée aux environs du commissariat n’était pas chose assez rare pour exciter l’attention.

André choisit deux pistolets dans sa montre et les chargea.

Depuis qu’il était seul, sa physionomie avait repris une expression de calme et de sombre fermeté.

Il rentra près de sa femme qui agrafait sa robe. Il s’approcha d’elle et la baisa au front.

« Tu n’es donc pas fâché contre moi ! s’écria-t-elle en le pressant contre son cœur.

— Il faut faire la valise, » dit-il.

Julie laissa tomber ses deux bras et le regarda stupéfaite.

« La valise ! répéta-t-elle, nous partons déjà ? »

L’idée lui vint vaguement qu’André voulait faire un voyage de Paris préliminaire, pour s’y assurer un établissement, avant de quitter Caen pour toujours.