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La certitude d’André prenait des raisons d’être, si elle ne pouvait pas augmenter.

Le commissaire dut céder, car la discussion s’éteignit.

La voix inconnue poursuivait cependant :

— Cette pensée-là a sauté aux yeux de M. Bancelle. Quand sa femme et ses enfants sont venus, il s’est écrié : « J’ai tout dit à cet homme-là ! Il savait que j’avais en caisse le prix de ma terre, outre mon échéance. Il a vu le secret, et le brassard lui appartient… »

André ne comprit pas cette dernière phrase, dont le sens précis eût été pour lui un coup de massue. Il n’avait pas besoin de cela. Tout son sang lui rougissait le visage et la sueur coulait à grosses gouttes de son front.

— Ils étaient deux ? demanda le commissaire.

— Oui, lui fut-il répondu. Il a fallu quatre mains occupées à la fois pour le travail de forçage.

— Quatre mains d’hommes vigoureux ?

— Non… La moitié de la besogne pouvait être faite par un enfant.

— Ou par une femme… prononça tout bas le commissaire.

— Ne m’as-tu pas dit, s’écria Mme Schwartz, que tu les avais rencontrés tous deux, hier soir, sortant à des onze heures !

André mit ses deux mains sur sa poitrine qui haletait. Mais l’idée de son innocence jaillit du sein même de cette détresse et il se releva tout d’un coup. Le désir lui vint de monter et de confondre en trois paroles cette absurde accusation. Il fit un pas, tout nu qu’il était, pour mettre ce dessein à exécution. Ce mouvement le porta en face de l’entrée, et son regard tomba pour la seconde fois sur la belle dormeuse qui toujours