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Les histoires des médecins ressemblent toutes à la pie voleuse : vous croyez que c’est un amant ; les preuves abondent, on a trouvé son chapeau. Allons donc ! c’était une affection de la rate !

Il y avait des semaines où Mme la baronne était folle du monde : la rate ; d’autres semaines où le monde lui faisait horreur ; le foie.

De même pour la toilette.

On avait découvert en elle, rarement, il est vrai, une sorte de colère sourde contre Blanche, sa fille bien-aimée. Le médecin disait, un homme charmant, cravaté en amour : « J’ai connu en 1829 une jeune femme très bien née, » etc.

Celle-là, c’était l’estomac.

On passerait volontiers ses jours et ses nuits avec un médecin chantant sur l’air de la Pie voleuse les bons tours du foie, de l’estomac et de la rate. Cela va très loin ; c’est tout un système de philosophie où le vice et la vertu sont remplacés avantageusement par la rate, le foie et l’estomac. Mais cela ne va pas à la cheville des docteurs poètes qui cultivent l’hystérie. On pourrait citer des dames respectables, abonnées à deux louis la visite pour ouïr les légendes de l’hystérie. Il n’y a pas de sot métier !

M. Schwartz surveillait sa femme, ou, pour mieux dire, son attrait eût été de l’espionner à fond, minutieusement et selon l’art des maris jaloux qui ont confiance. Mais il faut, pour cela, le temps, et le temps est argent ; M. Schwartz faisait comme nous tous, le malheureux : au lieu de se divertir à éclairer sa femme, il était obligé de gagner de l’argent. Il gardait donc sa confiance et ses doutes, s’informant à bâtons rompus, égarant parfois sa dignité jusqu’à interroger Mme Sicard et Domergue, qui n’en savaient pas plus long que lui.