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nes de sociétés immobilières, et je suppose qu’elles étaient toutes gérées par de fort honnêtes gens, mais on n’aime pas généralement ces débitants de domaines qui coupent les héritages par petits morceaux et vendent à la livre les pierres sculptées.

Arrivèrent de Paris, à la queue leu-leu, quinze ou vingt iconoclastes patentés, bien élevés, bien couverts, pour tâter le bon vieux domaine et voir un peu par quels joints on pourrait le dépecer proprement. Il y avait dans le pays peu de logis convenables pour abriter de si galants seigneurs. Le père Péchet fut l’hôte d’un jeune banquier de la chaussée d’Antin qui se nommait M. J.-B. Schwartz, et dont l’habileté proverbiale augmentait rapidement et sûrement sa fortune déjà très considérable.

M. Schwartz, selon son habitude, jugea l’affaire d’un coup-d’œil ; c’était une manière d’aigle pour les choses de la spéculation. Ayant jugé l’affaire, il voulut tuer le temps et demanda un guide qui pût le mettre en rapport avec deux ou trois compagnies de perdrix ; le père Péchet lui donna Michel, et Michel lui fit exterminer une demi-douzaine de pièces.

M. Schwartz, qui n’avait jamais opéré pareil carnage, trouva le petit garçon charmant ; il causa avec lui en revenant à la ferme, et l’intelligente naïveté de Michel le charma. Les Parisiens, lors même qu’ils portent les noms les plus foncés de l’Alsace, sont sujets à tomber de leur haut quand ils rencontrent autre chose que des ânes à quelques lieues de la place Saint-Georges. M. Schwartz interrogea le père Péchet en mangeant sa propre chasse : délicieux festin, et Michel, qui ne s’était guère inquiété de cela, put apprendre qu’il était étranger, orphelin, et qu’on le gardait à la ferme par charité.