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plus hardi, unissait la gaieté française à de bonnes études. C’étaient deux jolis sujets.

Cocotte reprit :

« Et, à ton idée, toujours, est-ce le patron qui est le maître à tous ?

— L’Habit Noir ? prononça Piquepuce en donnant à ce nom une intraduisible emphase.

— Oui, l’Habit Noir des Habits Noirs ? insista Cocotte. Le Mogol ? »

Piquepuce fut un instant silencieux, puis il grommela comme à regret :

« Moi, je n’ai jamais été que jusqu’au patron. S’il y a quelque chose au-dessus, cherche ! »

Mais il ajouta tout de suite après :

« Petit, c’est là le joint. Si on savait la chose, on serait riche. On est instruit, n’est-ce pas vrai ? et on a le fil. Eh bien ! ça fait mal au cœur de rester dans les subalternes.

— À qui le dis-tu ! s’écria Cocotte. Moi qui ai fait des couplets qu’on chante dans les goguettes les plus panachées !… Il te tient dur, le patron, hé ? »

Piquepuce lui serra le bras fortement et gronda :

« Comme toi, par le cou ! »

Ils passèrent le seuil d’un second liquoriste. Ces choses se font naturellement, et comme on met un pied devant l’autre. De vingt pas en vingt pas, dans Paris hospitalier, la ruine verte peut ainsi ponctuer une conversation intéressante.

« D’où venais-tu ? demanda Cocotte en quittant le second comptoir.

— Du château, et toi ?

— De plus loin et de plus près. J’avais affaire au caissier et à la comtesse.

— Quelle affaire ?