Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome I.djvu/290

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Dieu merci, pour moi et pour ceux qui me touchent de près, je n’ai ni inquiétude à avoir ni renseignement à prendre. Monsieur Mathieu, vous avez peut-être vos raisons pour être discret ?

— Oui, monsieur le baron, dit Trois-Pattes. J’ai mes raisons. »

Le banquier pirouetta sur lui-même.

« Temps, argent, grommela-t-il en regagnant son bureau. Affaire finie. Bien le bonsoir. »

Trois-Pattes, ainsi congédié, rampa aussitôt vers la porte. Sur le seuil, il s’arrêta et dit avec humilité :

« J’avais compté sur l’obligeance de monsieur le baron… »

Celui-ci, qui feuilletait déjà ses papiers avec une certaine affectation, l’interrompit et gronda ces deux mots :

« Au galop !

— Ce serait pour savoir, poursuivit Trois-Pattes, si monsieur le baron pourrait me recommander à M. Schwartz, le père de M. Maurice, que monsieur le baron a connu à Caen sous la restauration. »

Les joues du banquier pâlirent. Il répondit pourtant, appuyant sur le dernier mot :

« Connu le père de Maurice, à Paris !

— Il n’y a pas d’offense, reprit Trois-Pattes, à Caen ou à Paris. J’ai quelqu’un qui cherche des personnes de Caen : la femme et la fille d’un banquier. Ça fut très riche autrefois ; c’est devenu pauvre comme Job : une histoire bien étonnante, allez ! Voyons ! J’ennuie monsieur le baron. Je vois bien d’ailleurs qu’il n’est pas content de moi. Mais je prends de l’âge et de l’expérience. Je n’aime pas regarder de trop près certaines gens ni certaines affaires. Je lui reparlerai de ce M. Schwartz… et de cette famille