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— Où prend-il cet argent ? demanda M. Schwartz.

— Le jeune M. Michel ? Je n’en sais rien. Si monsieur le baron veut, je m’informerai.

— Il y a du Lecoq là-dedans ! » pensa tout haut le banquier.

Trois-Pattes baissa les yeux et ne répondit pas. Les sourcils de M. Schwartz étaient froncés.

Après un silence, l’estropié reprit avec une sorte de répugnance :

« Il y une dame… qui doit être fort riche. »

La promenade de M. Schwartz eut un temps d’arrêt.

« Jeune ? interrogea-t-il.

— Très belle, » répliqua Trois-Pattes.

Les yeux du banquier, fixés sur lui avec insistance, sollicitaient une réponse plus explicite.

« Ce n’est pas la comtesse ? commença-t-il.

— Non, » répartit Trois-Pattes.

Le banquier fit un dernier tour de chambre, en proie à une visible agitation, puis il s’arrêta de nouveau brusquement.

« Monsieur Mathieu, dit-il, je n’ai d’autre intérêt en tout ceci que le besoin d’être utile. Ce jeune homme, M. Michel, a été mon employé et même quelque chose de plus. Mon bon cœur m’a causé déjà bien des embarras ; mais je suis récompensé par l’estime publique… Vous en savez long sur cette comtesse Corona, n’est-ce pas ?

— Assez long, répondit Trois-Pattes. Le colonel lui laissera tout…

— Je ne parle pas de cela ! interrompit vivement M. Schwartz.

— C’est juste. Monsieur le baron est en règle. »

Les rôles changeaient. Le laconisme n’était plus du côté du banquier. Il reprit :