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— Mieux, je vous remercie.

— Vous êtes si changée ! Et voyez comme votre main tremble !

— Beaucoup mieux ! » répéta Edmée avec impatience.

Elle ajouta plus froidement :

« Je voudrais voir Mme la baronne sur-le-champ. »

Puis encore :

« Dites qu’on ne fasse pas ma chambre et qu’on ne mette pas mon couvert. »

Domergue la regarda, étonné. Il y avait dans ses gros yeux de la tristesse et de la compassion. Il sortit.

Pour la seconde fois Edmée était seule. Elle s’assit auprès de la fenêtre et attendit.

Les fenêtres du salon donnaient sur le jardin et gardaient leurs jalousies fermées. Edmée Leber glissa son regard distrait au travers des planchettes, et vit les hôtes du dimanche disséminés par petits groupes sur la magnifique pelouse d’où le soleil s’était retiré. Blanche n’était point là, non plus que sa mère, la baronne. Deux dames d’un certain âge jouaient au volant avec une grande affectation de gaieté ; quelques messieurs faisaient cercle autour de M. Cotentin de la Lourdeville, qui tenait à la main le journal du soir.

Des promeneurs passaient le long du château sous les jalousies et causaient.

« Je ne vois là-dedans, dit l’un d’eux, rien que de parfaitement honorable. M. le baron se souvient qu’au début de sa carrière il fut le banquier des pauvres.

— Bon métier ! fut-il répondu.

— On gagne souvent gros avec les pauvres !

— On peut être à la fois habile et philanthrope, dit Cotentin. Ça et ça !

— Il y a des anecdotes étonnantes ! J’ai ouï parler