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amoureux. C’était la même voix, pénétrante et douce ; peut-être étaient-ce les mêmes paroles.

La porte cochère s’ouvrit, puis se referma. André était seul.

Il tomba sur ses genoux, rugissant de colère et de douleur : « Julie ! Julie ! »

Comme pour répondre à ce cri d’angoisse qui râlait dans la gorge d’André, les fenêtres du second étage s’éclairèrent. Une ombre gracieuse se dessina sur les rideaux ; le chapeau jeté au loin, laissa libre une chevelure mobile et bouclée.

Puis une autre ombre vint, et la mousseline indiscrète groupa les deux silhouettes en un long baiser.

Les mains d’André déchirèrent sa poitrine.

Quand la lumière s’éteignit, il poussa un gémissement qui était encore le nom de Julie.

Un instant, il eut espoir de mourir. Il s’affaissa sur lui-même et resta, le visage contre terre, comme un cadavre, longtemps.

Au matin, un passant charitable le secoua du pied pour l’éveiller et s’éloigna en radotant la phrase sacramentelle de la prudhommie parisienne :

« La boisson ! si on peut se mettre dans des états pareils ! »

André quitta la place Louvois sans se retourner pour regarder la maison maudite.

Ses premiers pas furent chancelants, puis il se raffermit, et nul n’aurait pu désormais le prendre pour un homme ivre. Il se dirigea vers la rue Saint-Honoré ; les portes de l’église Saint-Roch s’ouvraient ; il fut le premier à en franchir le seuil.

Il prit ce même bas-côté par où il avait gagné, un mois auparavant, la chapelle de là Vierge. En passant devant le maître-autel, il tressaillit parce qu’il recon-