Les yeux énormes de l’enfant se fixèrent sur lui.
« C’est toi qui lui as fait du chagrin ! » prononça-t-elle tout bas avec un étrange accent de menace.
L’embarras naissait dans la contenance du colonel.
Fanchette reporta ses regards sur le mort.
« Je suis fâchée d’être venue, murmura-t-elle d’une voix tremblante. Je n’ai jamais été si triste de ma vie.
— C’est pour cela qu’il faut t’en venir, dirent ensemble ses deux compagnons.
— Non… je ne veux pas m’en aller… quelque chose me retient… Es-tu bien sûr, père, qu’on ne pourrait pas l’éveiller ?
— Quelle idée ! » s’écria M. Lecoq.
Et le vieillard, plus calme :
« Très sûr, petite fille. »
Fanchette soupira.
« Si j’essayais, pensa-t-elle tout haut. En lui faisant mal… bien mal !…
— On ne fait pas mal à une pierre, » dit M. Lecoq.
La fillette lui jeta un regard de rancune et demanda en s’adressant à son aïeul :
« C’est vrai que les morts sont comme des pierres ?
— Tout comme, » répliqua le vieillard.
Fanchette saisit le bras d’André. Ce contact lui donna un frémissement. Pourtant, elle murmura :
« Non, ce n’est pas tout comme ! Les pierres sont froides et dures. »
Son teint s’était animé légèrement. Elle souleva le bras d’André à deux ou trois reprises ; la troisième fois, le bras d’André lui échappa et retomba inerte. Elle recula de plusieurs pas. Lecoq venait de dire au colonel, tout bas :
« S’il s’éveillait… »
Le colonel, en sa vie, tel que vous le voyez, avait