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divers, que tu avais dû le lire au moment où le journal s’imprima, c’est-à-dire au mois de septembre, et que, depuis plus de trois mois, tu me crois mort peut-être.

Si j’avais su… Mais peut-être aussi les autres journaux n’ont-ils pas répété cette nouvelle insignifiante. Peut-être la bonté de Dieu t’a-t-elle gardé ta pauvre tranquillité.

Peut-être. En attendant, je souffrais le martyre, et si je n’eusse pas trouvé le messager qu’il me fallait, je crois que je serais parti pour Paris, au risque de tout perdre.

Car il y a des craintes qui sont en moi et que je ne t’ai dites qu’à demi. Lambert, ce malheureux qui fut un instant mon compagnon, m’avait fait une demi-révélation. Notre bourreau te connaissait ; il t’avait vue souriant à notre petit endormi ; il te trouvait belle…

Mais que je te dise, car je ne veux pas rester sur une pensée qui me rend fou, que je te dise ce qu’il y avait dans le journal français du mois de septembre.

Ce démon, Julie, je le connais. C’est celui qui… Mais le reconnaîtrais-tu, cet insulteur de nuit ?… Il pourrait, à Paris, s’approcher de toi sans exciter ta défiance. Le malheur est sur nous. J’ai fait un rêve horrible.

Ah ! nous avions bien deviné ! la distance est longue de Caen à Sartènes, mais le malheur a des ailes !

Et voilà que je parle encore de ce que je voudrais taire ! C’est du journal qu’il s’agit. Le journal raconte la double tentative d’évasion, dont tu trouveras la vraie relation dans mes lettres. Il rapporte les faits à sa manière, selon la physionomie du résultat, et après avoir constaté que le cabaretier Lambert devait être exécuté le lendemain, il ajoute :

« Selon les apparences, les deux condamnés avaient