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une rue conduisait à la route de Paris, l’autre à la route de Pont-l’Évêque. On pouvait aller à droite ou à gauche.

À droite, c’était Julie et un danger presque inévitable.

À gauche, c’était l’exil, l’inconnu, et je ne sais quelle chance de se venger.

André prit la gauche et se mit à courir.

Quand il dépassa les dernières maisons de Caen, l’aube blanchissait une mince bande de l’horizon.

Sous le premier arbre de la route, il y avait un homme avec un cheval. L’homme le vit venir et ne bougea pas.

« Holà ! garçon ! cria résolûment le jeune ciseleur, fera-t-il jour demain, que tu saches ?

— Hié ! Bijou ! » fit le rustre en détachant son cheval. Puis il répondit :

« Demain, pour sûr, not’ maître, et aujourd’hui aussi… C’est-il vous qu’êtes monsieur Antoine ?

— Parbleu ! » répliqua André.

Le paysan avait un bon bonnet de coton blanc ramené sur ses yeux.

« Faut bien savoir, reprit-il paisiblement. Demander n’est pas offenser. »

Il ôta son bonnet, ce qui ne le décoiffa point, car il en avait deux l’un sur l’autre ; il ôta sa blouse, ce qui ne montra point sa chemise, la blouse étant double comme le bonnet. Il tendit le tout à André avec un pantalon de toile brune, qu’il portait roulé sous le bras.

En un clin d’œil, André eut dépouillé son costume de prisonnier et fait sa toilette.

Le paysan le regardait en bâillant.

« C’est de remettre Bijou à Dives, chez Guillaume