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était de sa chute, il se rua sur le lit, d’instinct plutôt que par réflexion, furieux, et criant :

« Ah ! tu es là, toi ! tu faisais le mort ! »

Ses deux mains, habituées à ce jeu, allèrent droit à la gorge d’André. Il était de force à étrangler un bœuf, et, en ce moment, où son va-tout était sur le tapis, la vie d’un homme n’eût pas pesé pour lui le poids d’un centime. Il y eut une lutte rapide comme l’éclair ; André et lui roulèrent sur le carreau, puis André seul se redressa. Son pied écrasait la gorge de Lambert.

Celui-ci ne fit qu’un effort pour se dégager.

« Dégommé ! gronda-t-il avec une résignation aussi soudaine que l’avait été sa colère. Après ça, ce n’est peut-être pas la case de l’Habit-Noir !

— Qui êtes-vous et que vous ai-je fait ? demanda le jeune ciseleur.

— Je suis celui qui va la danser au point du jour, répondit le cabaretier presque gaiement. Petit, tu as une crâne poigne ! J’ai été un peu vif, c’est que je n’avais pas de temps à perdre en politesses. Tu es plus fort que moi ; c’est bon ; si ça t’est égal de me lâcher, je serai sage. »

André retira son pied et dit froidement :

« C’est cela, soyez sage. »

Lambert se tâta, dès qu’il fut debout, et montra du doigt l’ouverture béante dont la lune éclairait encore la moitié.

« Mimi, dit-il, non sans une étrange bonne humeur, on a gratté assez longtemps à ta porte, avant d’entrer.

— Voilà, en effet, près d’un mois que je vous entends, répliqua André.

— Et tu ne m’as pas dénoncé pour avoir du tabac et des petits verres ? C’est mignon de ta part. As-tu passé l’inspection ?