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voir. Mais avant de continuer, y a des choses qui louchent là dedans. Est-ce que la jeune personne ne s’étonna pas qu’on t’avait confié une besogne pareille ?

— Si fait bien, mais le patron avait prévu la botte, et je répondis, d’après ses instructions, qu’il avait juste à cette heure-là un rendez-vous de vie et de mort pour l’affaire de l’ancienne opulence de ses ancêtres, et que j’avais mérité l’excès de sa confiance par un long dévouement comparable à celui du caniche.

Elle n’écouta pas beaucoup mes explications. Ça me faisait l’effet qu’elle avait le cœur bien gros, malgré tout.

Elle se laissa tomber sur une chaise et mit sa tête entre ses mains.

— Et que faisais-tu, toi ? demanda Mme Canada.

— Dame, je n’étais pas trop à mon aise. D’être déconcerté, ça me rend bavard ; je voulus lui débiter un petit bout de raisonnement, comme quoi les hommes c’est tous des lâches et des libertins, et que ça avait agacé le patron de la voir tromper par un fiancé si coupable. Elle découvrit son visage et me dit avec un pauvre sourire bien triste :

— Mon fiancé, c’est le cavalier Mora. Tout ce qu’il fait est bien fait. Dites-lui que je l’attends ce soir, et que je suis bien reconnaissante.